Lettre pour Jean-Pierre Bacri

Lettre ouverte de Cyril Leconte à Jean-Pierre Bacri
“Marche ou crève !”

dimanche 25 juin 2017,

Bonjour Jean-Pierre Bacri, voici un texte que j'aimerais partager sur l'éviction de Bayrou....un peu de fantaisie couchée sur l'écran. Merci

Marche ou crève !


En cette journée de fête de la musique, nous avons le regret de signaler la disparition de la voix béarnaise de l'orchestre gouvernementale : Bayrou abandonne son pupitre.
En bon «garde des sots», le projet de moralisation de la vie publique était son cheval de bataille et devait être une des première réformes phares de l'ère Macron. Seulement, à trop aimer les chevaux et à jouer avec, Bayrou a été le premier à faire les frais de ce désir actuel de transparence à tout prix.

Le soupçon d'emplois fictifs d'assistés parlementaires du MoDem aura suffit à balayer le président du MoDem de la photo de famille gouvernementale. Bayrou n'a absolument rien à se reprocher. Il a montré toute sa bonne volonté pour défendre les «assistés» de son parti en appelant Radio France. Il s'est plaint, en honnête citoyen comme il le dit, «des méthodes inquisitrices» des journalistes à l'égard des salariés du MoDem. Et Bayrou, dieu sait qu'il la connaît la force de l’inquisition depuis son flirt avec Babel, sa pouliche fétiche de l'écurie deux. Qui sont ces inquisiteurs ? Une ribambelle de journalistes tordus que le diable a envoyés pour le persécuter, lui, l'homme qui a fait gagner Macron, l'équivalent de la cuisse de Jupiter, rende-vous compte !

Edouard Philippe, très à cheval sur le sens des manières, a rappelé à l'ordre le ministre de la justice. Mais le Béarnais a bombé le torse et expliqué qu'il disait ce que bon lui semblait. Comme s'il allait, lui, homme de pouvoir depuis des décennies, laisser un groom mal rasé venu du Havre lui dicter sa conduite. Non, c'était la goutte d'eau qui débordait du vase : le manque de respect aux anciens combattants, ça met Bayrou en pétard. Souvenez-vous, en 2002, du gosse qui faisait les poches de l'homme politique au moment d'une photo souvenir en période de meeting. Protocole ou pas, François l'a giflé au premier contact, une claque dont ce désormais grand garçon doit encore porter les marques.
Seulement, le voilà embarqué dans un navire où on veut du neuf, pas des souvenirs. François a déjà 66 ans, alors tous ces jeunots qui lui marchent dessus comme s'il était du vulgaire crottin, il réagit illico et hennit de colère pour réclamer le respect que son rang impose.

A sa grande surprise, les apôtres du jeunisme et de l'image l'ont poussé à la porte, sans cérémonie. On sait à quel point le sentimentalisme peut s'avérer nuisible à la quête de performance. Mitterrand prenant la main de Helmut Kohl, si vous avez les images, regardez-les bien parce que notre nouveau président ne s'abaissera jamais à prendre délicatement la main à l'un de ses homologues. Tout au contraire, il a opté pour une longue poignée de main type broyeuse. Demandez donc à Trump, depuis leur rencontre, la courbe de tweets du chef de la maison blanche est en chute libre car utiliser la main gauche, ça lui donne des suées et la droite est encore très douloureuse. Revenons en France.

Pour la nouvelle équipe au pouvoir, reste un soucis épineux, celui de la confession. Bayrou était chiant, ne comprenait rien aux chiffres et à la communication moderne, répétait du Montaigne à faire fuir tout homme moderne, certes. Mais on pouvait compter sur lui pour confesser les pêchers du gouvernement chaque dimanche et mettre l'électorat catholique dans sa poche.

D'un autre côté, cet amoureux de la campagne, fier de poser en bottes et en tracteur tout en recrachant éternellement ces valeurs de scouts, faisait un peu tâche au milieu du reste du staff. Urbains, branchés et décomplexés, les membres du gouvernement avaient de réelles difficultés à cerner ce campagnard appelant sa femme Babette. Bien que pittoresque, la mayonnaise ne pouvait pas prendre.

Puis, faisons un peu de prospectives.
Le cœur de Bayrou aurait-il supporter cet ouragan de libéralisme économique et ses conséquences en terme de justice sociale ? Et le libéralisme des mœurs, avec la dépénalisation des consommateurs de cannabis probables et, peut-être même sa légalisation, comment François aurait pu continuer à lire sereinement des histoires à ses 21 petits-enfants en se sachant associer à ce projet de mauvaises herbes?

Cet agrégé de lettres classiques, qui a appris à abréger ses discours pour combattre son bégaiement, va pouvoir se consacrer à la ville de Pau. Entre deux permanences, Bayrou pourra se laisser bercer par la musique de Victor-Hugo ou contemplera, de la fenêtre de la mairie, un îlot de la France qui marche encore avec lui.






Auteur: Cyril Leconte

Lettre pour Jean-Pierre Bacri. Lettre 1.

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