Lettre pour Élise Lucet

Lettre ouverte de Virginie Dupeyroux à Élise Lucet
“Manifestation ANDEVA (amiante) 13 octobre 2017”

jeudi 5 octobre 2017,

Bonjour Madame Lucet,

Je me nomme Virginie Dupeyroux, je vis dans la Nièvre.

Je suis fille et petite-fille de victimes environnementales de l’amiante – ma famille était, dans les années 1950, riveraine du Comptoir des Minéraux et Matières Premières d’Aulnay-sous-Bois, qui a broyé cette fibre cancérigène en plein centre-ville cinq décennies durant, dont les effets différés nous rattrapent aujourd’hui ; plus de quatre cents victimes du CMMP ont été recensées par les associations début 2016.

Le vendredi 13 octobre, à 14 heures, au départ de la tour Montparnasse, aura lieu la manifestation nationale de l’ANDEVA (Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante), à Paris https://andeva.fr/.

À l’heure où le Parquet de Paris annonce l’abandon des poursuites judiciaires de nombreux dossiers emblématiques du scandale de l’amiante, sous le prétexte fallacieux que l’on ne saurait dater précisément la contamination des victimes, en moyenne dix personnes par jour meurent toujours de mésothéliomes ou de cancers broncho-pulmonaires dû à l’amiante, en France. Les prévisions restent aussi sombres pour les années à venir. Les responsables de cette tragédie sanitaire et environnementale, qui ont volontairement désinformé sur la cancérogénicité de cette fibre pendant près d’un siècle (le rapport d’un inspecteur du travail, Denis Auribault, établissait pourtant cet état de fait dès 1906 !), n’ont toujours pas de comptes à rendre à la justice. Il n’y a, officiellement, ni responsable, ni coupable.

Vivre avec le chagrin, la colère, est le quotidien de ma famille et de milliers d’autres en France. Nous autres, familles de victimes, avons écopé de la perpétuité.
Je suis membre du Conseil d’Administration de Ban Asbestos (« bannir l’amiante », réseau mondial de lutte contre l’amiante) France, membre de l’Andeva et de l’Association Henri Pézerat. C’est à titre personnel que je vous contacte, afin de vous prévenir de cette manifestation nationale et de vous demander d’y consacrer un reportage dans Envoyé Spécial.

Nous sommes les invisibles de cette société. Le silence nous tue autant que le sentiment d’injustice devenu notre quotidien, autant que l’impunité des industriels qui se sont si longtemps octroyé un véritable permis de tuer.

J’espère que vous serez sensibles à ma demande. Nous avons besoin de médiatisation, nous avons besoin de votre aide !

Avec mes remerciements,

Virginie Dupeyroux



Auteur: Virginie Dupeyroux

Lettre pour Élise Lucet. Lettre 1926.

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