Lettre pour François Morel

Lettre ouverte de Cyril Leconte à François Morel
“Billet d'humeur”

dimanche 5 mars 2017,

Bonjour François Morel, voici un billet d'humeur... 5/3

Un long dimanche de fiançailles

Accompagné de Pénélope sur l'estrade, notre Ulysse des temps modernes a rassemblé ce dimanche ses troupes (35 000 à 200 000 troufions suivant les sponsors) place du trocadéro, avec la tour Eiffel en toile de fond. Ne jamais négliger la force romantique du décor. Toujours en course pour les présidentielles et faisant preuve d'une endurance à toute épreuve, Fillon a fustigé ces compères «quittant le navire». Sarkozy et Juppé attendaient très certainement la noyade finale du paquebot Fillon et le passage de témoin. Sans sourciller, le Sarthois en remet une couche. Pire, voilà que sa bonne femme sort de sa cuisine et se met à intervenir dans l'espace médiatique pour le soutenir. Quel culot ! Quelle famille ! Quel spectacle ! Ce n'est pas Carlita qui aurait osé se mélanger avec toute cette foule grouillante et risquer de chopper la syphilis ou une autre cochonnerie suite à l'attaque d'un paysan en rut.

En bon capitaine, Fillon a harangué le peuple de droite jusqu'à faire gronder Paris. Un petit parfum de mai 68 embaumait la place : les drapeaux tricolores, la Marseillaise entonnée à plusieurs reprises. Il manquait juste un Cohn Bendit en tête de gondole pour se croire sous les pavés. L'écolo, qui mange à tous les râteliers, n'était malheureusement pas disponible ce dimanche, ayant déjà réservé cette journée à la préparation de sa nouvelle pouliche : Macron de Rothschild.

Fillon, c'est devenu l' Ernesto Guevara qui souhaite créer 2, 3, voire 4 Vietnam : le spectre de l'emploi fictif, massacre à la tronçonneuse de la justice de son pays, un parti des Républicains qui se planque bien derrière lui et le laisse seul prendre les coups en première ligne. Le combatif candidat fonce tête baissée au contact des sans dents de droites, donc sans doute un peu plus civilisé que ceux de gauche, mais tout de même... Il mène campagne en allumant des brasiers comme on allumait, jadis, Brigitte Bardot. En fin limier, il pénètre dans les âmes des ménages français et leur fait perdre le Nord.

Après «un long hiver» hollandais, cet autre François en appelle à la France des sans-culottes comme à celle des cathédrales. Le mélange des genres ne l'embarrasse pas. François est lui-même un pur produit de l'eau bénite et de la rébellion. A 14 ans, il balançait déjà des ampoules lacrymogènes en pleine classe de son collège catholique pour protester contre la stupidité des programmes imposés. Le Che sarthois, désormais, souhaite imposer son propre programme à tous, sans chichi.

En revanche, ce dimanche, interdiction était donnée à la figuration de banderoles dans le rassemblement. Le trop tentant«travail, famille, patrie » ne passe pas encore assez bien à l'image. Le candidat décomplexé n'ignore pas que les Français se raidissent facilement avec certains détails de l'Histoire et sait se montrer mesuré. Ainsi, le chef rebelle a préféré se référer à Gavroche sur les barricades pour illustrer l'élévation de la République et déclarer la guerre au «totalitarisme islamique». Victor Hugo pour dézinguer du sarrasin, il fallait y penser. Sera-t-il le premier président de la 5ème république à rompre ses liens diplomatiques et commerciaux avec l'Arabie-Saoudite ? Inch' Allah. Même le front national ne va pas aussi loin.
A proximité du cortège, des gens tambourinaient sur des casseroles au cri de « Nous aussi, on veut être payé à rien foutre». Faut toujours qu'une bande d'abrutis vienne gâcher la fête. Quand ce ne sont pas des casseurs, c'est une flopée de bobos parisiens qui ne comprend rien aux règles de la révolution, quand bien même elle est conservatrice et, assurée gauloise sans filtre.

Fillon qui réaffirme sa flamme à la France en lui proposant ses services, c'est un peu comme une nouvelle demande en mariage. Reste à savoir si la grande dame se laissera séduire par tant d'effronteries ? Ce qui est sûr est que si le mariage a lieu, la nouvelle première dame de France ne se lancera pas dans la collecte des pièces jaunes, dont elle ignore peut être même l'existence.

Bernadette, elle est très chouette
Mais Pénélope préfère s'taper du fric...

Auteur: Cyril Leconte